Se placer comme précurseur d’une économie circulaire grâce au tri des déchets est l’objectif poursuivi depuis quelques années par l’intercommunale Idelux Environnement en charge du tri des déchets à Arlon en province de Luxembourg…
A la base de ce projet, une idée visionnaire a enthousiasmé les gestionnaires de cette intercommunale wallonne : pourquoi ne pas faire en sorte que la récolte des déchets organiques, déjà valorisés en compost, adhère à quelque chose de plus grand, et intègre un projet soutenu par la Commission européenne ?
Projet Cafipla
Et c’est là qu’est né Cafipla, un projet financé par le programme BBI. Le programme Bio-based industry (BBI) a été élaboré pour répondre aux défis identifiés par le consortium industriel, Bio-based Industry Consortium (BIC), et décrits dans l’agenda des innovations et recherches stratégiques. BIC relie l’industrie, le monde universitaire, les régions et les citoyens pour transformer les matières premières biosourcées en nouveaux produits et applications durables, et créer des écosystèmes de bioéconomie circulaire grâce aux investissements, à l’innovation et au savoir-faire. Les priorités du programme BBI, terminé depuis fin 2020, sont aujourd’hui reprises par le programme Circular Biobased Europe (CBE).
Depuis le 1er juin 2020, pour une durée de trois ans, le projet Cafipla réunit 12 partenaires européens issus du monde scientifique et industriel. Ensemble, et grâce à un financement de plus de 4.4 millions d’euros, ils développent une solution de valorisation des résidus et déchets biogéniques, peu ou pas utilisés, pour en extraire des acides carboxyliques et des fibres grâce à un traitement unique, innovant et durable. Le but est donc de fabriquer, à partir de déchet, des briques élémentaires biosourcées qui entreront dans la composition de produits biosourcés comme par exemple des bioplastiques.
La société Idelux Environnement contribue non seulement à l’approvisionnement en biomasse, mais aussi dans l’optimisation de son expertise dans la gestion des flux de biodéchets, de tri, de méthanisation et de gestion du compostage. Le site de Tenneville accueille aussi le réacteur ‘pilote’ développé par les partenaires du projet qui permet de traiter jusqu’à 1,5 tonne de biodéchets par semaine.
Workshop
Dans le cadre de ce projet, Idelux a accueilli au mois de juin dernier le workshop « Assessment of the opportunities for an innovative biogenic waste processing concept ». Après une présentation des derniers résultats obtenus sur l’analyse des matières premières et des fibres obtenues, le workshop s’est organisé en ateliers de discussion autour des thématiques politique, économique, sociale et réglementaire au cours desquels les participants ont partagé leurs vues sur les défis et barrières pour le développement des filières de valorisation des déchets et des résidus.
La section « publications » du site web vous permettra d’avoir plus d’information sur les résultats du projet CAFIPLA.
Marie-Aline Pierrard, cheffe de projet chez Idelux : « Nous étions les premiers en Wallonie à posséder un processus de digestion anaérobie des poubelles municipales ». Depuis, Liège a emboîté le pas aux Ardennais.
Marie-Aline Pierrard, cheffe de projet chez Idelux depuis plus de 5 ans, jongle avec les projets européens avec brio. Elle travaille avec 80 autres employés dans la section exploitation de l’intercommunale arlonaise. Elle nous détaille la spécificité de cette société ambitieuse : « La plupart des citoyens pensent que nous sommes uniquement une décharge. Mais sur notre site situé à Tenneville, la décharge n’est plus en fonction. En 2009, nous étions les premiers en Wallonie à posséder une biométhanisation [La digestion anaérobie est un traitement biologique durant lequel la matière organique est assimilée, en absence d’oxygène, par les micro-organismes.]. Nous n’avons pas d’incinérateur. Donc, on produit du biogaz, une source d’énergie, à partir des poubelles municipales », développe-t-elle pour le NCP Wallonie.
L’importance de bien trier ces déchets
La cheffe de projet insiste que cette activité ne peut être poursuivie qu’à condition de bien trier ces déchets ménagers : « Je profite toujours quand j’ai l’occasion d’avoir la parole de bien insister sur le fait que c’est important de bien trier ses déchets. La population pense souvent que tous les déchets sont mélangés. Or, les camions sont bien compartimentés : une partie pour la poubelle organique et une partie pour la poubelle résiduelle. On a deux usines, spécifiquement dédiées soit aux déchets organiques, soit aux déchets résiduels, qui sont localisées à deux endroits géographiques différents ».
Au mieux les déchets sont triés, au plus la matière première sera de qualité. « Nous donnons en quelque sorte la matière première aux chercheurs. Ils l’étudient et estiment si on peut faire mieux que ce qui existe actuellement, soit mieux que du compost ou du digestat, …. «
De partenaire à coordinateur de projets européens
Le projet Cafipla n’est pas le premier poursuivi par Idelux Environnement. Et la cheffe de projet de citer les différentes implications de l’intercommunale : « Dans VOLATILE, nous étions juste partenaires. Nous avons évolué vers un rôle de work package leader sur CAFIPLA et RECOVER. Maintenant, on doit coordonner des tasks leader et donc, nous avons plus de responsabilités. On a rédigé des délivrables, coordonné les délivrables des partenaires, c’est une implication différente. On intègre un pilote, on accueille l’ensemble des partenaires chez nous, c’est un challenge aussi pour nous. Ce n’est pas toujours évident de convaincre l’équipe qu’il y a un intérêt à participer à ce projet ! ».
Pour ce faire, Marie-Aline insiste sur l’importance de se constituer un réseau. « Il faut trouver les keyplayers qui vont vous aider et vous porter dans un projet. Le réseautage est un réel avantage dans les projets européens. On l’apprend par l’expérience. Rencontrer différentes sociétés me permet aussi de comparer et de voir ce qu’il se passe à l’étranger, dans d’autres pays dans les mêmes secteurs. J’apprécie cet aspect multiculturel et multidisciplinaire de la fonction ».
Marie-Aline reste constamment informée sur les différents appels du CBE-JU (Circular Bio-based Europe Joint Undertaking) qui est le fruit de la collaboration entre la Commission européenne, et le consortium d’entreprises nommé Bio-based Industries Consortium (BIC). « Je participe régulièrement aux Info days et je m’intéresse aux topics dans lesquels nous pouvons nous impliquer. Je fais un listing que je présente à mes collègues puis je contacte mon réseau et s’il y a vraiment un intérêt de notre part, on y va ! »
Freins pour participer aux projets EU ?
Alors que participer à un projet européen peut sembler de prime abord laborieux, Marie-Aline livre un conseil aux acteurs de l’écosystème wallon qui souhaitent franchir le pas. « Lorsqu’on intègre un projet européen, il ne faut pas avoir peur d’engager quelqu’un car ça demande un investissement en temps et en énergie ! L’aspect organisationnelle de façon globale peut être un frein. Il faut se coordonner avec les autres partenaires, participer aux réunions, s’investir ! Une bonne entente entre les partenaires et coordinateur est essentielle. Plus on est impliqué dans un projet européen, plus les gens se souviennent de nous. »
Et de conclure : « Notre but, c’est vraiment de participer aux développements de projets et à leur mise en place. Cela nous permet aussi de montrer nos difficultés, de faire passer des messages sur des problématiques industrielles auprès de nos dirigeants. »
Marie-Aline Pierrard sera présente à l’infoday Circular Bio-based Europe Joint Undertaking (CBE JU) ce 16 mars. Elle témoignera sur son expérience de montage de projets européens.